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Juin 2003 - Double Je, présenté par Bernard Pivot
(retranscrit par Lucile)
Bernard Pivot : Si on mavait dit un jour que jinterviewerais le chanteur guitariste du groupe placebo, je ne laurais certainement pas cru (et vous non plus dailleurs). Et bien je lai fait, à Bordeaux, le jour du dernier concert de la tournée en France du groupe Placebo. Brian Molko, cest son nom - et rien quà prononcer son nom, jentends les cris damour et denthousiasme du public juvénile - Brian Molko est probablement le seul chanteur anglo-américain de rock à parler le français. Brian Molko.
(Le reportage débute avec comme bande son « The bitter end » et un extrait dun concert.
Ensuite Bernard Pivot recueille les impressions des gens qui font la queue en attendant louverture des portes du concert de Bordeaux).
Bernard Pivot : 8 heures dattentes pour une heure et demi de spectacle, vous trouvez que ça vaut le coup?
Les jeunes présents : Oui oui, bien sur !
Un jeune homme : On est touché quoi quand on lentend chanter en français
Une jeune fille : La personnalité du chanteur, la musique tout quoi .
(Extrait du concert, Brian fait un petit signe à la caméra en chantant. On voit Bernard Pivot se déhancher sur la musique en coulisse)
Brian Molko : (montrant ses guitares à Bernard Pivot) Ma ptite collection de guitares.
Bernard Pivot : (les comptant) 1, 2, 3, 4, 5, 6
Brian: 7
B. P.: 7!
Brian : Ouais. Et elles sont tous des femmes, et elles ont tous des noms.
B. P. : ah oui?
Brian : ouais ouais.
(Extrait dun concert, « The bitter end » toujours).
(Bernard Pivot et Brian Molko sont installé sur la scène de Bordeaux où se déroulera le concert)
B. P. : Vous êtes né en Belgique dun père américain et dune mère écossaise. Alors êtes vous belges, américain ou ang britannique.
Brian : Hum ben jai un passeport britannique et un passeport américain aussi, mais ce qui est intéressant cest que mon père est dorigine française et hum... dune mère italienne, dun père français et hum né en Egypte. Alors ouais cest
B. P. : Ouais et il y en a encore dautres comme ça?
Brian : Hum ben non mon frère il est né à New York.
B. P. : Vous êtes anglais et américain
Brian: (rectifiant) Ecossais (Rire)
B. P.: Pour vous cest une différence?
Brian: Hum ouais une grande différence.
B. P.: Laquelle?
Brian: Ben hum
B. P.: Pour vous hein
Brian: Ben historique déjà
B. P.: oui mais pour vous en quoi cest différent?
Brian: Je vis en Angleterre et les anglais se foutent de la gueule des écossais tout le temps. Je me sens pas ni américain, ni vraiment britannique mais si on me force à trouver du patriotisme
B. P.: écossais
Brian: ouais, jdirais écossais ouais
B. P.: ouais écossais
Brian: ouais.
(Rire)
B. P.: Pendant la guerre en Irak, est ce que vous nauriez pas préférez finalement être belge, luxembourgeois ou français plutôt que
Brian: Pour moi ça à commencer quand jai vu les photos du transport des hum prisonniers apparemment terroristes hum talibans, de lAfghanistan hum en Amérique, a Guantanamo ce camp de concentration hum jai vu des photos de ça, ça ma écoeuré, vraiment vraiment écoeuré alors jai commencer à pensé à redonner mon passeport américain puis ce truc avec lIrak sest passé, jétais contre la guerre en Irak, je me suis dis : « si tu redonnes ton passeport, tu perds ta voix, sinon tu nauras plus de voix, tu nauras plus de droits de dire nimporte quoi ». Si cest encore si le passeport veut dire que cest encore mon pays, même si je ny ai jamais habité, jai encore le droit de dire des choses contre le gouvernement américain.
B. P.: Mais quand vous passez une douane vous navez pas plutôt envie, plutôt que de tendre votre passeport, de tendre finalement votre dernier CD?
Brian: (rire) Hum cest comme Oscar Wilde quand il est allé aux Etats-Unis et on lui demande «vous avez quelque chose à déclarer» il lui répond «rien que mon génie » cest ça? (Rire) Hum non ben cest plus facile pour moi quand on va aux Etats-Unis parce que moi je sors le passeport américain, moi je passe comme ça et puis le reste il passe une heure en douane alors (rire).
B. P.: Mais votre vrai passeport, cest quand même votre musique Cest ce que je voulais
Brian: Hum ouais cest vrai, cest vrai. Hum ouais ben la musique cest cest le langage international de lémotion alors hum ouais mais hum les douaniers sen foutent hein (rire)
B. P.: Oui mais parce que la musique est ce que ça enfin surtout la musique du rock, est ce quelle nest pas une vraie transgression des frontières.
Brian: Jespère que si ouais et pff langlais et devenu quand même aussi la langue de la musique.
B. P.: Vous voulez dire que universellement, intimement, historiquement la langue du rock cest langlais. Et ça ne peut pas être une autre langue?
Brian: Hum de la musique populaire je ne pense pas non. Ben ça a commencé avec lesclavage, aux Etats-Unis. Hum et cest là où le gospel, gospel music, a commencé, et cest là où le blues est venu de ça, et cest a cause du blues que le rock existe
B. P.: Oui mais
Brian: ben en fait ça vient de lAfrique tout à commencer en Afrique essentiellement.
B. P.: Non mais estimez-vous quil peut exister un rock anglais, pakistanais, russe, japonais qui nutiliserais pas la langue anglaise.
Brian: Ya ça existe mais malheureusement ça se vend pas autant que que la musique avec des voix anglaises.
B. P.: Est-ce que vous avez été tenté décrire des chansons, de rock, en français?
Brian: Mon français écrit nest pas super hum même à lécole, cétait pas super super la lecture ça va. Mais pour moi cest pas naturel décrire en français alors
B. P.: Oui mais imaginez, pensez que
Brian: On a fait des traductions, on avait une chanson qui sappelait « Burger queen », quon a traduite en français. En ce moment on bosse sur une version française dune des chansons de lalbum, on va peut-être, si ça marche, sortir en 45 tours.
B. P.: Donc là vous pensez quil peut exister quand même une une petite adéquation entre la langue française et le rock
Brian: Ouais il y a plein de groupes rock français que je respecte. Mon premier concert cétait un groupe javais 11 ans, cétait à Arlon en Belgique, et cétait un groupe de rock français, Téléphone. Jean-Louis Aubert. Alors cétait une belle introduction aux concerts.
B. P.: Oui mais vous dites vous-même que ce rock, quil soit français ou dune autre langue, il ne marche pas internationalement.
Brian: Cest parce que la langue anglaise est devenue la langue internationale.
B.P.:Oui, ne trouvez- vous pas quil y a entre le rock et la langue anglaise une sorte de consanguinité, une sorte de filiation intime qui exclue toutes autres langues?
Brian: Peut-être mais jme souviens quil y avait un vote ils ont voté, le gouvernement américain quand tout au début hum des Etats-Unis, ils ont voté sur quelle serait la langue officielle du pays. Et je pense que langlais a gagné par 2-3 votes sur lallemand. Alors ça, ça aurait été intéressant ça aurait été une différences
B.P.: Oui, vous chanteriez en allemand aujourdhui
Brian: Peut-être peut-être tout le monde parlerait allemand ouais.
B.P.: Mais est ce que la mondialisation par la musique et par le rock de (et de beaucoup) précédé la mondialisation par lindustrie et le commerce?
Brian: (il réfléchit) Waw. Précédé ?
B.P.: Oui.
Brian: Non, jpense quelle a suivit.
B.P.: Vous pensez que ça a suivit ?
Brian: Oui. Et cest dommage que cest lesclavage qui a hum crée hum la naissance du rock, avec le blues et le gospel mais hum cétait une situation affreuse mais quand même en héritage on a quelque chose de splendide, de
B.P.: Mais, navez-vous pas limpression que le rock, et puis donc attaché à la langue anglaise, participe de limpérialisme américain heu et donc de la puissance culturelle américaine et donc de sa puissance politique ?
Brian: Le vrai rock n roll cest le langage de la rébellion. Cest le langage de la contre culture, « counter culture ».
B.P.: Oui.
Brian: Alors je pense pas du tout quelle participe à cet impérialisme culturel et politique américaine. Peut-être que cest la seule chose qui qui pourrait lutter contre.
B.P.: Vous croyez.
(Extrait de « The bitter end » toujours en concert).
B.P.: Mais cette contestation elle est récupérée, elle devient de lindustrie, elle devient du commerce, elle devient de largent.
Brian: Cest dommage que ça devienne de lindustrie, du commerce de plus en plus en plus. Cest quand les comptables commencent à venir les P.D-g des maisons de disques.
B.P.: Est-ce que Placebo, à votre manière et à votre échelon, vous ne participez pas justement de cette expansion américaine par la langue, par la musique, par largent ?
Brian: On a du succès en Angleterre, on reste un groupe culte aux Etats-Unis, mais cest vraiment en Europe où ça déchire pour nous. Et ça cest quelque dintéressant. Cest plutôt la France, lAllemagne, les pays méditerranéennes où on a vraiment le plus grand succès.
B.P.: Ouais vous vous défaussez un peu là, comme aux cartes (Rires) Bon alors
Brian: (riant) vous posez des questions assez hum assez profondes. (Rire)
B.P.: Bon alors. Langlais, je suppose, est votre maternelle, votre langue paternelle. Vous avez passé lessentiel de votre jeunesse, je crois, au Luxembourg, votre enfance.
Brian: Ouais, de lâge de 3 ans jusquà lâge de 17ans et puis jai déménagé à Londres.
B.P.: Oui. Bon alors le français cest une langue que vous avez apprise au lycée ?
Brian: Dès 6 ans jai commencé à apprendre le français. Bien sur jai grandit avec la télé française. Jai grandi avec votre émission, avec « Apostrophe ».
B.P.: Merci.
Brian: hum avec « les enfants du rock », avec le cinéma français, les chaînes belges, les chaînes françaises. Jai pas trop regardé les chaînes allemandes parce que je faisais le français à lécole alors jcomprenais moins. Mais cétait intéressant aussi au Luxembourg que la langue luxembourgeoise est restée un patois jusquà 1981 et là ils lont fait une langue officielle. Alors avant, à lécole, si tu moi je suis passé par la maternelle luxembourgeoise, à lécole, avant 1981, les langues officielles du Luxembourg cétaient le français et lallemand, et cest ça quon apprenait à lécole. Le luxembourgeois, cétait quelque chose quon apprenait dans la rue, mais maintenant, on enseigne les 3 langues.
B.P. : Mais vos parents parlaient combien de langues ?
Brian: Mon père, il parlait le français ben il parle encore il parle le français, langlais, litalien et larabe.
B.P.: oui Et larabe !?
Brian: Ouais parce que ouais, il est né en Egypte, et étant financier il faisait beaucoup de business et
B.P.: Oui et puis il parlait une autre langue internationale, cest la langue de largent puisquil est banquier hein.
Brian: Ouais ben jpense que dès que je suis devenu adolescent cétait assez clair que jallais pas le suivre dans cette voie-là ouais.
B.P.: Oui alors dans votre premier disque, dans votre premier CD, notamment vous évoquez vos révoltes dadolescent. Ces révoltes, cétait contre qui, contre quoi?
Brian: Contre ma situation familiale probablement, contre la religion parce que jai eu une enfance assez religieuse
B.P.: le conformisme?
Brian: lhomophobie, et ben cet album-là, je lai écrit pendant mes 2 ans et demi au chômage à Londres, après luniversité, alors il est né, je suppose, de la déprime aussi. Ouais, cétait un exorcisme.
B.P.: Le jeune homme que vous étiez quand vous aviez 16-17 ans déjà en révolte, vous deviez être insupportable non?
Brian: Jétais très erratique et ouais, javais beaucoup dénergie, et jétais assez « casse-cul » on dit
B.P.: « Casse-cul »
Brian: ouais ouais
B.P.: en français on dit
Brian: « Casse-couille »
B.P.: « casse-couille » oui.
Brian: a ouais ouais, jétait assez « casse
B.P. : Oui, et donc . Oui alors vos parents devaient se dirent « mais quel étrange canard on a mis au monde » non ?
Brian: Ma mère était très religieuse, et mon père voulait que je rentre dans la finance. Jai dû me rebellé assez jeune, et forgé mon identité à un très jeune âge, et jai dû trouvez une force en moi, une détermination, pour continuer, une sorte de foie aveugle en soi pour forger se truc pour en arriver-là où on est maintenant.
B.P.: Cest lénergie du rock !
(Extrait de « soulmates », la reprise rock de « sleeping with ghosts », toujours en live)
Brian: Javais aucun endroit pour mettre toute cette énergie alors cest peut-être pour ça que je lai retourné vers moi-même et que jai commencer à apprendre la guitare et écouter de la musique. Il y avait quand même des très bons disquaires à Lux.
B.P.: Aujourdhui, quels sont vos rapports avec vos parents?
Brian: Nous vivons tous dans des pays différents. Toute la famille sest séparée comme ça.
B.P.: Est-ce quils sont fiers quand même de votre succès?
Brian: Je pense ouais, jle pense.
B.P.: Mais ils vous lont dis ou pas ?
Brian: Hum ouais, ouais, si jles crois, cest pas sur, jsuis pas sur si je les crois, mais ils me lont dit. Mais quand même, moi jtrouve cest pas nécessaire quils mle disent parce quils ne voulaient pas que je le fasse de toute façon.
B.P.: Oui
Brian: Alors pour moi cest une revendication un ptit peu, un ptit « fuck you » (il accompagne le geste à la parole) pour eux pour « hey, vous vouliez pas que je fasse ça, regardez ! ». Si jaurais eu un ptit peu plus daide, imaginez ce que jaurai put faire.
B.P.: Aujourdhui vous estimez que vous êtes plus loin de la Banque ou de lEglise?
Brian: Plutôt de la banque parce que mon éducation religieuse ma beaucoup donné même si je crois plus en dieu. La Bible, que jai beaucoup lu, il y a des histoires magnifiques dedans.
B.P.: Elle vous a apporté votre esprit, votre sensibilité.
Brian: Oui, elle ma donné un sens du un sens spirituel, mais aussi me donner beaucoup de métaphores et dimages pour utiliser dans la chanson.
B.P.: Ca a nourrit votre sensibilité
Brian: Ouais, exactement.
B.P.: Alors que la banque ne ne lui a pas apporté grand-chose
Brian: Pendant que jétais à luniversité, pendant lété, jai bossé pour un mois, et je faisais du « shredding ».
B.P.: Cest à dire ?
Brian: Ben jprenais les documents et jles foutais au « shredder » et puis voilà. Et après 2 jours je mamusais à dire « alors quest ce que je peux mettre dans le « shredder » aujourdhui? Parce que hier jai mis du plastique alors » et ouais, cétait comme ça, cest tout ce que jai fait. Alors là, cette expérience nétait pas bonne pour moi du tout. Jallais même, ça mécoeurais tant, que jallais même me masturber sur leur temps. (Rire). Ouais, cétait pour moi jmenfermais dans les toilettes et cétait « really really, I hate this, jai horreur de ça ». Et cest ça, de se branler à la banque cest une façon personnelle de dire « fuck you ». (Rires)
B.P.: Hum Brian, jaimerais quon revienne au rock. Si on peut répertorier les raisons historiques pour lesquelles le jazz a exprimé la révolte des noirs, est-ce quon peut aujourdhui répertorier les raisons pour lesquelles le rock est selon vous une musique aussi de contestations et de révoltes ?
Brian: Lintolérance, le racisme, lhomophobie, le les misogynes, et hum ouais, la haine religieuse aussi. Cest tous des trucs qui nous touchent personnellement dune façon ou dune autre de notre vie directement. On a tous souffert dune intolérance ou dune autre tous les 3.
B.P.: Vous avez souffert tous les 3 de
Brian: Moi et Stef, à cause de notre sexualité, qui sont différentes.
B.P.: Votre sexualité, puisque vous labordez, cest un « double je », vous êtes bisexuel.
Brian: Oui, oui cest vrai.
B.P.: Un autre « double je » !
Brian: Ouais, ouais le meilleur des deux mondes dirai-je! (Rires)
B.P.: Vous connaissez le mot de Woody Allen, il lavait dit un jour « finalement celui qui a le plus de chance de rentrer chez lui le samedi soir avec quelquun, cest quand même le bisexuel ».
Brian: Je ne la connaissais pas celle-là. Il a aussi ma préférée cétait « Les 2 choses dans la vie, quon peu contrôler dans la vie, cest lart et la masturbation, 2 sujets sur lesquels je suis un expert ». (Rire)
B.P.: Et pourquoi votre groupe sappelle-t-il Placebo ?
Brian: Hum ben on ny a pas vraiment pensé.
B.P.: Ah bon ?
Brian: Non pas trop, pas trop. Cétait plutôt le son. Moi jpense que cest important davoir un nom que tu peux imaginer 40 000 personnes en train de chanter en unisson alors : PLA-CE-BO PLA-CE-BO ça marche.
B.P.: Pacebo, cest un médicament qui est inutile, qui est neutre, qui est
Brian: Oui exactement
B.P.: Mais votre musique, vos textes, cest tous sauf la neutralité, lindifférence
Brian: On cherche souvent un nom quand on cherche un nom de groupe, on cherche un nom de génie et on ne trouve presque pas presque jamais. Alors après avoir plusieurs noms, on se dit « cest quoi le meilleur », cest celui-la qui reste. Cest quand on est forcé dy penser après. Cest quand les gens commencent à nous poser des questions comme celle-là quon commence à penser au coté déceptif, au coté médical. Mais, à lâge de 20 ans nous ça (il claque des doigts) sonnait bien à loreille.
B.P.: Cétait simplement de la musique.
Brian: Ouais, cétait, cétait
B.P.: Cétait un mot musical.
Brian: Ouais, un mot musical. Comme ça
B.P.: Cest tout.
Brian: Et puis cest devenu quelque chose dautre à force de faire des interviews.
B.P.: Et vous considérez-vous comme un compositeur-chanteur engagé?
Brian: Mmm mmm ouais, yeh, de plus en plus.
B.P.: Et vous le serez de plus en plus ?
Brian: Jespère ouais.
B.P.: Mais ça veut dire donc que vous voulez changer le monde mais mais
Brian: non pas chan je sais pas si
B.P.: un peu, un peu, peser sur le monde.
Brian: Jpense pas que la musique peut changer le monde mais si on peut changer les idées les idées, dune personne ou de plusieurs, on contribue
B.P.: Mais changer les idées de deux ou trois personnes, cest déjà changer un peu le monde.
Brian: Ouais cest le début. Et on espère quils vont commencer à communiquer avec les autres, et quils vont, après le concert, quil y aurait un échange avec eux et leurs potes, et que peut-être leurs idées changeront aussi.
B.P.: Oui. Mais, vous êtes pas déçu, comme beaucoup dartistes, beaucoup de pas seulement des chanteurs, des écrivains, des intellectuels etc qui veulent changer le monde, et puis finalement, au bout du compte, on saperçoit que le monde change mais pas tout à fait comme ils le désireraient.
Brian: Ben moi je trouve vraiment quon quon est comme des dinosaures, vraiment, que le monde sera là après nous. Particulièrement si lon continu à utiliser ce monde comme une poubelle. La mère nature, « mother nature », elle va pas supporter ça pour trop longtemps. On sera comme des dinosaures, et le monde continuera de tourné sans nous, sans les être humain, avec notre arrogance incroyable. Elle est si grande quon pense quil ny a pas même pas de vie sur dautres planètes. Alors là cest super arrogant. Mais bien sur quil y a de la vie sur dautre planète ! Its life, Jim, but not as we know it !
B.P.: Et vous pensez quun jour on pourra écouter Placebo sur une autre planète? Par des gens qui ne sont pas des hommes ?
Brian: Pourquoi pas, ouais. Il doit y avoir des civilisations qui nous regardent et qui voit cette planète primitive et qui se foutent de notre gueule « regardez les êtres humains, quest ce qui sont cons ! Et écoutez cette musique de merde quils font en plus ! Placebo ? Cest quoi ça ?"
(Extrait de « Bulletproof cupid » en live toujours).
B.P.: Est-ce quil y a une différence entre le public français et le public anglais ?
Brian: A ouais, une grande différence une très grande différence.
B.P.: Laquelle ?
Brian: Ben cest lémotion, cest la passion. Le public anglais est plus réservé que le public français. Mais avec nous, dès le début, il y a toujours eu une histoire damour entre nous et le public français. Je pense que, parce quil y a un romantisme dans ce quon fait, un romantisme qui nest pas sentimental, mais qui vient de la tradition des gens comme Baudelaire par exemple, et vous avez cette tradition littéraire, ici, en France, quon a pas que les anglais nont pas vraiment eu. Vous avez eu Verlaine, Rimbaud, Baudelaire les surréalismes, vous avez eu Sartres et Camu, des gens comme ça. Alors quand même les anglais on eu Oscar Wilde mais cest pas la même chose.
B.P.: Vous voulez dire que, si je vous ai bien compris, que le public français est plus rêveur, il est plus romantique, il est plus émotif, il est plus sensible que le public anglais.
Brian: Oui, absolument oui.
B.P.: Et comment ça se manifeste quand la foule est là (il montre en bas de la scène)? Quand vous êtes devant la foule, comment le percevez-vous ?
Brian: Ben cest un échange, un échange démotion, une connexion qui va au qui est presque magique, qui va au-delà du physique. Cest vraiment quelque chose qui hum cest un ptit peu comme faire lamour un ptit peu. Des fois si le concert est vraiment bien, on se sent en train de faire lamour avec 4 000 gens.
B.P.: Alors vous vivez à Londres.
Brian: oui.
B.P.: Pourriez-vous vivre à Paris ?
Brian: Jaimerais beaucoup vivre à Paris.
B.P.: Alors pourquoi ne le faite-vous pas ?
Brian: Hum en ce moment cest une question de temps, une question de fric et moins il y a de temps pour le faire. Mais si ouais ouais, dans quelques années cest très possible que ça se passe. Jaimerais beaucoup. Jai beaucoup damis là-bas. Jai rencontré beaucoup de gens, beaucoup dartistes, beaucoup de créateurs. Et jaime beaucoup la France. Jaime beaucoup les français. Et jai grandit avec la culture française alors ça cest assez naturel pour moi. Alors ça serait pas pour les clubs ou les discothèques que je déménagerais à Paris, ça serait pour quelque chose dautre.
B.P.: Quoi ?
Brian: Probablement le calme et hum la langue, la littérature et une sensibilité différente.
B.P.: Merci Brian.
Brian: Merci Bernard (ils se serrent la main) super.
(Extrait audio de « The bitter end »)
B.P. : On aura le plaisir de retrouver Brian Molko à la rentrée en septembre, au cours dun concert exceptionnel à Bercy